HISTOIRE DES MOERES
HISTOIRE des MOERES
d'après Charles Baillou 1927
d'après Charles Baillou 1927
Dans la quatrième section des wateringues, il existe un bassin de 21.000 hectares, présentant en général une inclinaison orientée vers la mer. Deux fractions de cette étendue, formant cuvette par rapport aux terres desséchées, constituaient autrefois un véritable lac, servant de réceptacle aux eaux des basses mers. Au début du XIXéme siècle, ces deux cuvettes, appelées Moëres, étaient encore couvertes, au dire des habitants, de 4 à 6 pieds d'eau salée.(1.5 à 2 m)
Le plus grand bassin, appelé Grande Moëre, a une superficie d'environ 3.150 hectares ; l'autre, la Petite Moëre, a une surface de 1.340 hectares.
Au début du XVIIe siècle, après une étude faite en compagnie de l'ingénieur Van Kuyhn, le baron Wenceslas de Coëberghen signe à Bruxelles, en 1616, avec le Prince Albert, une convention selon laquelle les Moëres seraient divisées en deux parties : la moitié, du côté de Bergues, devenait la propriété du baron, l'autre, celle de Furnes, restait au prince Albert.
Dès l'année suivante, en 1617,
il fut accordé au baron Wenceslas de Coëberghen « tout hauts moyens et
toute basse justice pour la partie lui appartenant, avec droit de
confiscation, de vente, de chasse et de biens bâtards, d'y établir un
curé, etc.
Suivant les plans de l'ingénieur Brunon Van Kuyhn, on commença, sur l'ordre du baron, à creuser en 1618 une ceinture en grand canal (Ringsboot), autour des Moëres appartenant à ce dernier ; de plus, avec la terre enlevée du Ringsboot, on établit une digne plus élevée non seulement que les marais, mais encore que les terres avoisinantes. Ce travail fut mené avec tant d'activité qu'en 1619, le Ringsboot, flanqué d'une haute digue, put retenir les eaux des terres supérieures. Un autre canal fut creusé, en 1620, jusqu'à Dunkerque, et on y adjoignit une écluse permettant d'écouler les eaux à la mer.
Dès 1622, beaucoup d'endroits se trouvèrent asséchés, dans la Grande et la Petite Moëres.
L'ingénieur Brunon ne s'arrêta pas là ; il fit creuser de nombreux fossés et rigoles, qui divisèrent le territoire en parcelles appelées « cavels », sortes de rectangles de 800 mètres de largeur environ. Tous ces fossés se déversaient dans le Ringsboot.
Une vingtaine de moulins, destinés à moudre le grain et à pomper l'eau, furent construits sur la digne.
Ceux-ci, tournant nuit et jour, avaient pour mission d'épuiser les eaux qui leur étaient amenées et de les déverser dans le canal de Dunkerque. Ils actionnaient au début de grandes roues à palettes, puis il leur fut adjoint un système plus perfectionné, constitué par des vis d'Archimède de 5 mètres de longueur sur lm50 de largeur, et capables d'élever 40 mètres cubes d'eau à la minute à 1 mètre de hauteur.
En 1624, on ensemença les Moëres en colza, et la récolte dépassa les espérances. Puis quelques plantations d'arbres furent essayées. En 1632, on comptait déjà, plus de 140 fermes dans les Moëres, une église fut bâtie, et en 1633, un village d'une quarantaine d'habitations fut édifié. Un marché s'y tint toutes les semaines.
Cette prospérité sans cesse grandissante fut pourtant éphémère. La guerre ayant éclaté entre Philippe IV, roi d'Espagne et comte de Flandre, et Louis XIII, roi de France, le général Lambay campa dans ce pays qui devint le théâtre de la guerre et fut complètement ruiné.
Suivant les plans de l'ingénieur Brunon Van Kuyhn, on commença, sur l'ordre du baron, à creuser en 1618 une ceinture en grand canal (Ringsboot), autour des Moëres appartenant à ce dernier ; de plus, avec la terre enlevée du Ringsboot, on établit une digne plus élevée non seulement que les marais, mais encore que les terres avoisinantes. Ce travail fut mené avec tant d'activité qu'en 1619, le Ringsboot, flanqué d'une haute digue, put retenir les eaux des terres supérieures. Un autre canal fut creusé, en 1620, jusqu'à Dunkerque, et on y adjoignit une écluse permettant d'écouler les eaux à la mer.
Dès 1622, beaucoup d'endroits se trouvèrent asséchés, dans la Grande et la Petite Moëres.
L'ingénieur Brunon ne s'arrêta pas là ; il fit creuser de nombreux fossés et rigoles, qui divisèrent le territoire en parcelles appelées « cavels », sortes de rectangles de 800 mètres de largeur environ. Tous ces fossés se déversaient dans le Ringsboot.
Une vingtaine de moulins, destinés à moudre le grain et à pomper l'eau, furent construits sur la digne.
Ceux-ci, tournant nuit et jour, avaient pour mission d'épuiser les eaux qui leur étaient amenées et de les déverser dans le canal de Dunkerque. Ils actionnaient au début de grandes roues à palettes, puis il leur fut adjoint un système plus perfectionné, constitué par des vis d'Archimède de 5 mètres de longueur sur lm50 de largeur, et capables d'élever 40 mètres cubes d'eau à la minute à 1 mètre de hauteur.
En 1624, on ensemença les Moëres en colza, et la récolte dépassa les espérances. Puis quelques plantations d'arbres furent essayées. En 1632, on comptait déjà, plus de 140 fermes dans les Moëres, une église fut bâtie, et en 1633, un village d'une quarantaine d'habitations fut édifié. Un marché s'y tint toutes les semaines.
Cette prospérité sans cesse grandissante fut pourtant éphémère. La guerre ayant éclaté entre Philippe IV, roi d'Espagne et comte de Flandre, et Louis XIII, roi de France, le général Lambay campa dans ce pays qui devint le théâtre de la guerre et fut complètement ruiné.
En 1646, chassé
de Courtrai, Menin, GraveIines, Cassel, Bourbourg, etc., le général
espagnol, marquis de Lède, menacé dans Dunkerque, ordonna, le 4
septembre, d'ouvrir les écluses. La chronique rapporte que la mer se
précipita dans les Moëres avec une telle violence que les habitants
s'enfuirent à grand ‘peine et que beaucoup furent noyés. Le baron
Wenceslas de Coëberghen, voyant ainsi son œuvre anéantie, en mourut de
chagrin. Les Moëres revinrent à leur état primitif.
Cent ans plus tard, le comte d'Hérouville sollicita et obtint en 1746 la concession des Moëres ; il reprit l'œuvre de Coëberghen, et en 1762 les Moëres retrouvèrent leur prospérité d'antan.
Malheureusement, le funeste traité de Paris de 1763, par lequel la France devait combler le port de Dunkerque et démolir l'écluse de la Cunette, qui évacuait à marée basse les eaux des Moëres, détruisit une partie des travaux. En vain essaya-t-on de remplacer les écluses par des lacis et des clapets, les terres n'étaient plus à l'abri des inondations. Découragée par tant de revers, la société chargée du dessèchement laissa tomber les digues et les moulins dans un délabrement tel que toute culture devint impossible.
Cependant, en 1779, la Compagnie hollandaise Wandermey répara les digues et reconstruisit les moulins ; une partie des terres furent de nouveau cultivées.
Cent ans plus tard, le comte d'Hérouville sollicita et obtint en 1746 la concession des Moëres ; il reprit l'œuvre de Coëberghen, et en 1762 les Moëres retrouvèrent leur prospérité d'antan.
Malheureusement, le funeste traité de Paris de 1763, par lequel la France devait combler le port de Dunkerque et démolir l'écluse de la Cunette, qui évacuait à marée basse les eaux des Moëres, détruisit une partie des travaux. En vain essaya-t-on de remplacer les écluses par des lacis et des clapets, les terres n'étaient plus à l'abri des inondations. Découragée par tant de revers, la société chargée du dessèchement laissa tomber les digues et les moulins dans un délabrement tel que toute culture devint impossible.
Cependant, en 1779, la Compagnie hollandaise Wandermey répara les digues et reconstruisit les moulins ; une partie des terres furent de nouveau cultivées.
Mais
le 20 avril 1793, la flotte anglaise bloquant Dunkerque, il fallut
encore recourir à l'inondation. En moins de deux heures, les eaux
montèrent de deux mètres dans le Ringsboot, la digue se rompit et les
Moëres furent de nouveau submergées. Pendant trois ans, on ne vit plus
sur cette malheureuse terre, qui avait coûté tant de labeurs, que
quelques pêcheurs et des marchands de roseaux. L'eau avait repris son
empire ; mais, avec une ardeur et une persévérance admirables, les
agriculteurs se hâtèrent de le lui disputer à nouveau.
La Société Wandermey obtint la concession des Moëres ; elle ne réussit que très imparfaitement dans son entreprise et une association de propriétaires lui succéda.
En 1802, le directeur, M. Buysen, se fit accorder par le Gouvernement la reconstitution de l'écluse de la Cuvette ; tous les désastres furent peu à peu réparés.
Alors que le pays redevenait prospère, les événements de 1813 à 1815 firent courir à la malheureuse région de nouveaux dangers. Pour sauver la France envahie, une nouvelle inondation était nécessaire.
M. Buysen cependant sauva les Moëres de la ruine complète en les inondant à l'eau douce. Les dégâts, bien que l'inondation n'eût duré que huit mois, furent très élevés. Après les désastres de 1818, M. Bosquillon de Jenlis, alors ingénieur de Dunkerque, reçut l'ordre d'ouvrir les écluses de la mer ; il n'obéit pas, et les Moëres furent préservéesEn 1820, sensiblement améliorées, elles donnaient déjà des superbes récoltes de blé, d'avoine et de colza ; l'activité agricole y renaissait.
Durant la Grande Guerre, les Moëres furent inondées par deux fois à l'eau douce. La première inondation dura du 30 septembre 1914 au 16 juin 1915 ; les terres, immédiatement remises en culture, ne souffrirent pas beaucoup.
La seconde, du 30 avril au 10 septembre 1918, fut désastreuse, et de nombreuses années furent nécessaires pour revenir à leur état d'avant-guerre.
En 1945
Les Moëres, ont de nouveau été inondées par l'occupant allemand
retranché dans la ville de Dunkerque qui, pour se protéger, avait
éventré les digues. On ne pouvait plus l'atteindre qu'en bateau. Après
huit mois de pompage, le village des Moëres fut à nouveau asséché. Les
paysans ramènent de la terre qu'ils répandent sur les sols imprégnés de
sel et les habitants reconstruisent leurs maisons.
La Société Wandermey obtint la concession des Moëres ; elle ne réussit que très imparfaitement dans son entreprise et une association de propriétaires lui succéda.
En 1802, le directeur, M. Buysen, se fit accorder par le Gouvernement la reconstitution de l'écluse de la Cuvette ; tous les désastres furent peu à peu réparés.
Alors que le pays redevenait prospère, les événements de 1813 à 1815 firent courir à la malheureuse région de nouveaux dangers. Pour sauver la France envahie, une nouvelle inondation était nécessaire.
M. Buysen cependant sauva les Moëres de la ruine complète en les inondant à l'eau douce. Les dégâts, bien que l'inondation n'eût duré que huit mois, furent très élevés. Après les désastres de 1818, M. Bosquillon de Jenlis, alors ingénieur de Dunkerque, reçut l'ordre d'ouvrir les écluses de la mer ; il n'obéit pas, et les Moëres furent préservéesEn 1820, sensiblement améliorées, elles donnaient déjà des superbes récoltes de blé, d'avoine et de colza ; l'activité agricole y renaissait.
Durant la Grande Guerre, les Moëres furent inondées par deux fois à l'eau douce. La première inondation dura du 30 septembre 1914 au 16 juin 1915 ; les terres, immédiatement remises en culture, ne souffrirent pas beaucoup.
La seconde, du 30 avril au 10 septembre 1918, fut désastreuse, et de nombreuses années furent nécessaires pour revenir à leur état d'avant-guerre.
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