LA PROCESSION DE NOTRE DAME DES DUNES LE 15 AOUT

 

LA PROCESSION DE NOTRE DAME DES DUNES LE 15 AOUT Au XIX SIECLE
 

 Sur le port, auprès du bureau des pilotes, la population maritime se rassemblait.
C'est leur fête, l'Assomption, c'est la fête de Notre-Dame des Dunes.
Transportée la veille à l'église St-Eloi, le 15 août on ramène en procession la statue miraculeuse dans sa petite chapelle,
deste sanctuaire dont les murailles couvertes d'ex-voto racontent les grâces obtenues par la Mère de Dieu.
La municipalité n'oserait interdire cette procession et, sur son passage, personne dans les rues ne se permettrait un cri : les pêcheurs s'y opposeraient, ces pêcheurs flamands, si braves qu'on ne pourrait dire si l'on est plus brave dans le corps de la marine. Quelque temps qu'il fasse, la procession a lieu.
C'est à quatre heures de l'après-midi qu'elle doit rentrer. Elle est partie de St-Eloi, allant vers la mer, et sur tout son parcours, les drapeaux multicolores, agités par le vent, font à la plupart des fenêtres, surtout aux plus élevées, des signaux d'allégresse ; les enfants sont à genoux sur les trottoirs, leurs mères derrière eux, et toute circulation est devenue impossible.
Sur la place de la Petite Chapelle, où l'on peut tenir plus nombreux, c'est une mêlée indescriptible.
La tête de la procession y arrive. D'abord deux suisses majestueux, puis, des enfants en courtes robes de mousseline blanche, des quantités de petites filles, dont quelques-unes n'ont pas cinq ans
Une à une, dans un ordre parfait, les bannières défilent enroulées sur les hampes, portées à plat à cause de la brise.

Voici un groupe de petits marins , ils appartiennent à l'institution "la Regina Cæli". Sur les épaules de six d'entre eux repose un navire en miniature, toutes voiles fièrement déployées comme des ailes, et sous pavillon français.
Immédiatement après eux marche d'un pas ferme et cadencé une vieille femme, le front haut, l'œil brillant de fierté et d'émotion contenue; elle porte la bannière de Notre-Dame des Dunes. Comme doyenne de la confrérie, elle attire tous les regards. Son costume est caractéristique : elle a des souliers vernis, des bas blancs sur lesquels s'arrête en-dessous des genoux une jupe d'un rouge très vif; son bonnet, son corsage blancs sont tout neufs, et un petit châle bleu, d'un bleu superbe, complète avec ce blanc et ce rouge l'alliance des couleurs françaises. 

Derrière elle, habillées exactement de la même façon, deux femmes à l'air résolu, de braves femmes, portant chacune sur un coussin de velours un poisson d'argent,  le bar de Dunkerque; puis, toujours en rouge, bleu et blanc, six autres femmes de pêcheurs prêtant leurs robustes épaules à la statue de Notre-Dame des Dunes.
Elle est bien petite, cette statue, et s'il y en a de plus belles, toujours est-il que les pêcheurs tiennent à celle-ci et que leurs femmes ne voudraient céder à personne l'honneur de la porter.
Le temps a poussé au noir la couleur primitive de la statue, car voici près de cinq siècles qu'on la découvrit dans les dunes, en réparant les fortifications de la ville. Elle a traversé ainsi les âges, toujours vénérée. 

Pendant la Terreur, cachée chez de pieuses femmes, elle a échappé à la destruction complète de la chapelle devenue un magasin de cartouches, et, depuis 1815, sur la façade de l'oratoire réédifié par souscription publique, on lit de nouveau l'inscription : a Ave maris stella! »
Et maintenant Notre-Dame des Dunes passe sous les pavillons de toutes les nations flottant dans les airs au travers de la place; les cloches sonnent, les tambours battent aux champs, toutes les bannières du cortège rangées des deux côtés s'inclinent; un frémissement semble courir dans cette foule, et bien des yeux se mouillent quand l'Etoile de la mer est arrivée au seuil de sa chapelle.
Un nombreux clergé y pénètre à sa suite, entonnant le Salve, Regina. Une partie de la procession se masse devant l'entrée étroite; les bannières se relèvent, la foule des curieux s'écoule silencieusement, et chacun songe à ceux qui sont en mer par ce temps.



 

 

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