Dunkerque et sa région LE FOLHUYS.

 LE FOLHUYS est une Fête donnée pour le départ des  équipages pour la pêche en Islande mais avant cela   pour le départ des escadres corsaires.   

Départ d’une Escadre (Royer) de corsaires en 1780

 Dans la première semaine d’avril 1780 ce fut une allée et venue constante de fournisseurs des fournitures les plus variées, que charretiers et trimardeurs portaient aux corsaires accostés au quai, ou qui conduisaient canots et chaloupes lorsqu’ils furent en rade, où habituellement se complétaient les armements.

Par prudence, des soldats escortaient les convois de poudres, tandis que des officiers d’artillerie à ce commis spécialement passaient la visite des canons. On éprouva l’utilité de la grue nouvellement installée à frais communs par l’Etat et la Chambre de Commerce, dans le but de charger à bord des navires les effets d’artillerie. Le commerce local était dans la joie, depuis les apothicaires qui avaient garni les coffres à médicaments, jusqu’à Mlle Bachelet, la marchande de modes chez laquelle on s’était pourvu de rubans pour les cocardes et pour les sifflets, en passant par les R. R. P. P. Carmes, Minimes et Récollets, entre lesquels on avait eu soin de répartir également les messes à dire avant le départ.

Mais les plus heureux étaient sûrement Delrue le traiteur, la veuve Depot et la veuve Leborgne, hôtelières, et en général tous les tenanciers d’auberges, de cabarets et de bouges. La fête avait commencé par le vin offert  aux hommes après la messe.

Bientôt, ce ne fut partout, au son des orchestres, que noces et festins, car les corsaires ne comptaient guère la dépense, surtout lorsque l’armateur la supportait.

Le banquet pour les officiers de chaque frégate coûta en moyenne 600 livres et le foyhus des équipages, suivi de bal, toujours pour chaque frégate, dépassa 4000 livres. Il faut ajouter à ces sommes environ 250 000 livres d’avances que les hommes avaient empochées à titre d’avances (beaucoup plus fortes à Dunkerque que dans les autres ports du royaume) et que, suivant la coutume, ils dépensaient jusqu’au dernier sou sitôt touchées.

Formidable bordée de près d’un millier d’hommes des nations les plus diverses, aux physionomies rudement modelées par une vie d’aventures, et pour la plupart raccolés sous des noms plus ou moins vrais par des rabatteurs dûment payés de leurs peines  Les officiers des états-majors se promenaient, vêtus avec recherche ; leurs garde-robes étaient la plupart du temps copieuses et riches. Les matelots dandinaient de par les rues leur torse pris dans l’ample chemise de flanelle rouge, les jambes perdues dans de larges culottes, et faisant résonner leurs lourdes bottes sur lé pavé. Les soldats des régiments de Chartres et de Rouergue s’essayaient à porter les vêtements de mer qu’ils venaient de toucher, vareuses, gilets de molleton, sarreaux et culottes de toile, grosses bottes qui gênaient leur marche.  .

   Le moment était venu de rassembler les équipages, besogne rien moins que facile. Les archers de l’Amirauté et la maréchaussée étaient sur les dents ; des piquets de fusiliers et de grenadiers patrouillaient de jour et de nuit ; Mathieu Pillaert, le clinqueur, avait beau multiplier les bans, parcourir onze fois la ville pour l’équipage du Calonne  qu’on avait eu le tort de ne pas retenir à bord, et dix-sept fois pour celui du Rohan-Soubise, en faisant allègrement clinquer son plat de cuivre ; le fourrier lui-même avait beau laisser l’un sur l’autre tomber ses avertissements du haut du ciel, il manquait toujours quelqu’un à l’appel. 88 hommes du Calonne, égaillés de par la ville, n’en avaient tenu nul compte ; on dut spécialement charger un archer de la Marine de les rechercher et de les garder en prison jusqu’à l’heure de l’embarquement. Les bourgeois paisibles de Dunkerque ne devaient guère fermer l’œil ces nuits-là ! Quelques-uns des marins engagés qui avaient mangé ou bu la totalité de leurs avances, se cachaient jusqu’au départ de leur capitaine, pour s’engager ensuite à un autre et toucher de nouvelles avances : ils n’étaient pas faciles à découvrir. Il fallait extraire de la prison ceux qu’on y avait enfermés à la suite de tapages ou de rixes ; un brigadier de la maréchaussée courut jusqu’à Bergues après deux déserteurs : il est équitable de constater qu’il les ramena. Dans le même but, un lieutenant du Rohan-Soubise dut faire le voyage d’Ostende, et un autre celui de Bruges. Enfin, le 13 avril, tout le monde se trouva au complet, et Royer donna l’ordre d’appareiller.

 Le folhuys pour le départ des équipages de la pêche en Islande

 Tous les marins de chaque bateau, auxquels s’adjoignent leurs femmes, entendent simultanément la messe.

Le midi, ils se réunissent de nouveau dans quelque auberge pour y prendre un repas en commun, et le soir, ils se livrent à des danses au son du violon. L’armateur fait les frais de la journée pour une somme fixe, et l’équipage qui ne sait pas toujours se borner dans ses amusements, en supporte le reste : On se livre assez fréquemment à des excès, dans ces réunions où la bière et les spiritueux coulent à grands flots, et comme la mésintelligence dans un équipage est une chose fâcheuse, les armateurs ont fait tout ce qu’ils ont pu pour abolir cette fête. Quelques-uns ont réussi et paient, pour en faire un meilleur usage, à chaque homme, lors de la liquidation des avances, une certaine somme à titre de folhuys.

 Une année à Dunkerque   par Victor Letellier 1850

 

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