HISTOIRE DE DUNKERQUE: LA MAISON DU MARIN
La maison du Marin, de Dunkerque,
La première élevée en France elle a pour objet de protéger contre l’exaction, le vol, la fraude, les marins qui fréquentent le port de Dunkerque, de les encourager à ménager pour eux et pour leurs familles un salaire péniblement acquis; d’aider à leurs progrès moraux et intellectuels, afin de faciliter le bon et prompt recrutement des équipages de commerce. Afin d’atteindre ce but, la Maison du Marin procure à un prix modéré aux marins le logement et la nourriture, elle leur offre une salle de lecture, une bibliothèque et une caisse de dépôts temporaires, tant pour l'argent que pour les effets d’habillement; elle tient enfin un enregistrement avec certificats à l’appui, des marins en expectative d’embarquement.
Elle a été instituée par une société qui se compose de bienfaiteurs, de fondateurs, de donateurs et de souscripteurs elle est placée sous le patronage de la municipalité et de la Chambre de commerce, et sous la haute protection des ministres de la marine et du commerce. Quant à ses ressources, elles se composent, en dehors des biens et revenus lui appartenant, des souscriptions annuelles, des dons volontaires et manuels, des quêtes, assemblées de charité, ventes de bienfaisance, concerts autorisés à son profit, de dons et legs, des subventions qui peuvent lui être accordées par: des institutions locales, les communes, la Chambre de commerce, les départements les gouvernements français et étrangers.
C’est au président Félix Faure que l'on doit la première idée de la Maison du Marin. Dès 1888, il avait ainsi présenté à la Chambre des députés un projet de loi pour créer chez nous, en faveur des marins, des établissements similaires à ceux qui existaient déjà, notamment, en Angleterre et en Hollande. La loi ne fut votée qu’en 1893.
Par suite de difficultés d’ordre administratif et financier, la Maison du Marin ne put ouvrir ses portes qu'en 1895. A ce moment, la Maison du Marin, située en plein centre des brumes, pouvait donner le logement à douze pensionnaires, avec les facilités pour doubler ce chiffre, en cas de réussite et de prospérité de l’œuvre;
ces logements étaient situés au deuxième et au troisième étages, le premier étant réservé pour le salon de lecture et de correspondance, ainsi que pour loger, au besoin, deux officiers dans la pièce affectée à la bibliothèque.
Les marins payaient, dès cette époque, 1 fr. 50 c. par jour pour être logés confortablement et avoir trois repas sains, abondants et bien servis, bizarre entreprise qui, dès le début, se voyait condamnée à être d’autant plus en déficit qu’elle prospérerait davantage, puisque chaque homme lui coûtait trois francs par jour et ne lui rapportait qu’un franc cinquante!
Mais, les marins arrivant de campagne ne gardent pas longtemps leurs économies de navigation et, leur argent dépensé, ils battent le pavé après avoir pris souvent des habitudes d’intempérance et d'oisiveté. La Maison du Marin fut donc instituée afin de mettre un frein à un état de choses aussi déplorable à l’époque où seule celle de Dunkerque venait d'ouvrir ses portes.
Le jour même de son ouverture, un pauvre diable de matelot venait y demander l’hospitalité; il fut reçu à bras ouverts. Le lendemain, ils étaient deux, puis trois, puis huit, et dix jours s’étaient à peine écoulés, lorsqu’un gendarme de la marine vint demander au gérant si la maison pouvait loger onze naufragés qui arrivaient d’Anvers. Il ne restait ce jour-là que trois lits disponibles. En quelques heures, huit nouveaux lits furent apportés, on se serra un peu, les naufragés furent installés, et, depuis lors, la maison marche avec vingt lits. On trouva même le moyen d’en installer un vingt et unième. Il paraît qu’on s’y trouva bien, qu’on s’y sentit chez soi, à l’abri des sollicitations importunes, qu’on y trouva la nourriture bonne, ainsi que le café et le cognac, car la moyenne a toujours été de quinze pensionnaires. Les marins y trouvent tout ce qu’il faut pour la correspondance, des journaux, des livres.
En 1896, la Maison du Marin a hébergé 547 matelots.
En 1897, ce nombre s’est élevé à 773, représentant 5.200 journées et 15.000 repas. En y ajoutant les 390 marins qui n’ont fait que passer (ce sont ceux qui viennent prendre un ou deux repas et repartent de suite soit par chemin de fer, soit à bord d’un navire), en y ajoutant aussi les 320 marins qui, grâce à leurs bons certificats, ont été inscrits sur le registre d’embarquement, on arrive à un chiffre total de près de 1.500 marins auxquels l’établissement a rendu service en 1897. Pendant le second semestre de cette même année, il y a eu quarante-trois jours où la maison a été au complet et où il a fallu refuser du monde. Une pareille situation ne pouvait durer; un agrandissement fut décidé. Il fallait trouver un terrain; pour cela, il fallait que la Maison du Marin fût déclarée d’utilité publique. Le décret fut signé le 28 mai 1897. Le terrain suivit le décret. Les travaux commencèrent aussitôt. Il fallait une façade simple, mais un peu originale, qui se gravât facilement dans la mémoire du matelot. Il fallait une entrée gaie, riante, des dégagements spacieux, des services généraux assez largement conçus pour faire face aux agrandissements futurs, des chambres bien aérées, bien agencées, des locaux séparés pour les capitaines, des salles de lecture et de correspondance ayant vue sur le chenal, sur la rade, afin que, chez eux, les marins pussent suivre les mouvements d'entrée et de sortie des navires. Il fallait enfin un jardin pour y installer des jeux. Tout cela fut réalisé. Ce qui, en 1895, n’était qu’un essai modeste, est aujourd’hui une œuvre complète et définitive. L’installation intérieure ne laisse rien à désirer : vestibule, escalier, salles à manger des capitaines et des marins, cabinet du médecin, bureau du gérant, salle de bagages, cuisine, jardin du gérant, jardin des marins, chambres, tout y est parfait.
Reconnue
d’utilité publique.
« Décret qui déclare d'utilité publique la société la Maison du Marin, de Dunkerque. (B. S. 3120, n° 51382.) Le Président, etc. ; sur le rapport du ministre de la marine ;
vu la demande faite par M. Féron, (article dédié) directeur de la société philanthropique et humanitaire la Maison du Marin, de Dunkerque, pour obtenir que cette société soit déclarée d’utilité publique; la délibération de l'assemblée générale de ladite société, en date du 16 avril 1896; la lettre du préfet du Nord, du 29 mars 1897 ; les statuts de la société la Maison du Marin, de Dunkerque; la loi du 30 janvier 1893; le Conseil d’État entendu; décrète :
Art. 1er La société philanthropique et humanitaire la Maison du Marin, de Dunkerque, est déclarée d’utilité publique ».
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