LA PECHE A LA BALEINE PERIODE DES NANTUCKOIS 1787/1793
Les Nantuckois
L'ile de Nantucket est située sur la côte Orientale des Etats-Unis, et appartient à l'état du Massachusets. Entourée d'une mer poissonneuse, elle était habitée au XVIIIe siècle par une population de quelques milliers d'habitants, vivant presque uniquement du produit de la pêche. Les Nantuckois avaient acquis une grande habileté dans la chasse à la baleine; ils n'avaient pas leurs pareils comme harponneurs et mieux encore que les Norvégiens ils savaient dépecer un cachalot, fondre la graisse, préparer les huiles, conserver les fanons.
La guerre de l'Indépendance ferma le marché de Londres aux huiles américaines, et divers états de la confédération, pour protéger leurs nationaux, imposèrent des droits d'importation très élevés sur les produits de l'île Nantucket.
Privés de débouchés, ne trouvant plus à écouler leurs huiles sous leur pavillon d'origine, les Nantuckois cherchèrent protection sous un autre drapeau. C'était l'époque où les Dunkerquois, désireux de reprendre la tentative d'armement baleiner qui avait échoué en 1777, sollicitaient l'autorisation de confier leurs navires à des capitaines étrangers expérimentés
Des relations s'établirent entre la Société d'armement Aget-Kueny-Coffyn et quelques capitaines nantuckois (dont Thubael Gardner négociateur et première famille à immigrer à Dunkerque). Quatre d'entre eux, obtinrent du Roi, en 1784, la permission de commander sous pavillon français.
Le « Calonne », capitaine Thubael Gardner ;
Le « Chardon v, capitaine John Most ;
Le « Maréchal de Castries », capitaine Paul Coffin ;
Le «Comte de Vergennes », capitaine Richard Coffin.
Le « Chardon v, capitaine John Most ;
Le « Maréchal de Castries », capitaine Paul Coffin ;
Le «Comte de Vergennes », capitaine Richard Coffin.
A bord de chacun d'eux, le capitaine, le second et six matelots étaient étrangers; le reste de l'état-major et de l'équipage se composait de 14 Français : en tout 22 hommes. Les navires étaient d'anciennes goélettes.
Les baleiniers quakers s’étaient parfaitement intégrés à la population dunkerquoise où leur religion était cependant totalement inconnue. Le protestantisme calviniste s’était implanté dans la région dunkerquoise dès 1534 mais personne n’avait jamais vu ces hommes entièrement vêtus de noir et portant un large chapeau de même couleur, la Bible sous le bras, et qui ne se réclamaient d’ailleurs pas du calvinisme mais revendiquaient une indépendance et la liberté de penser.
Quoi qu'il en soit, les quelques capitaines qui commandèrent les expéditions de 1784 et de 1785 décidèrent leurs compatriotes à émigrer dans un pays où l'accueil était si cordial.
le capitaine Thubael Gardner fut un des premiers Nantuckois qui vinrent prendre le commandement des baleiniers de Dunkerque. Son exemple était plus éloquent que tous les pourparlers en faveur de l'émigration. Un riche Nantuckois, nommé Rotch, fit les démarches nécessaires pour aplanir toutes les difficultés ; l'armateur dunkerquois Coffyn avança une partie des frais nécessaires, et l'installation des émigrants fut préparée par les soins de la Marine.
Bientôt, les arrivages se succédent; les différentes
familles sont logées chez des particuliers. Vu l'affluence, les bâtiments de la corderie de la marine étaient concédés aux Nantuckois, en attendant qu'on eût disposé dans l'île Jeanty, leurs demeures et leurs usines, suivant les instructions qu'ils avaient données.
Ces émigrants nantuckois étaient, en majeure partie, de simples matelots, et il n'y avait parmi eux que trois armateurs ayant une certaine surface.
Les trois armateurs de 1788 furent suivis de quelques autres, et en 1790 on comptait en notre ville six ou sept armateurs nantuckois.
L'arrivée des Nantuckois fut cause du développement considérable que prit l'armement à la baleine à partir de 1787. Avant eux, Dunkerque avait péniblement équipé six navires par an.
1787- Dunkerque compte quatorze navires pour la pêche à la baleine.
1788- comme l’année précédente quatorze feront campagne.
1789- quinze bâtiments quittèrent Dunkerque. Un essai de pêche fut même tenté sans succès dans la Méditerranée par le sloop « Benjamin », qui continua sa campagne sur les côtes d'Afrique où il rencontra beaucoup de cachalots ; mais il eut si mauvais temps qu'il ne put en prendre qu'un seul.
1790- c’est dix-huit navires qui prendront la mer pour la campagne à la baleine.
Malgré leur mérite, les Nantuckois auraient eu quelque peine à réussir sans l'appui que l'Etat leur prodigua sous forme de subventions et de primes. On leur accorda d'abord la faveur de porter le pavillon français, bien que les propriétaires, les capitaines et la plus grande partie des équipages de leurs navires fussent étranger! Puis on leur alloua une prime de 50 livres par tonneau de jauge et par campagne.
On donnait ainsi aux Nantuckois un monopole de fait, si bien que les négociants français qui désiraient armer eux aussi pour la pêche à la baleine, devaient, en fournissant de nombreuses garanties, solliciter humblement la faveur de jouir des avantages accordés en France aux Nantuckois. Mais on ne la leur refusa pas.
Les armateurs Dunkerquois, rivalisèrent avec les Nantuckois et expédièrent leurs navires à Islande, au Groenland, au Brésil, au Cap de Bonne-Espérance, et même à Madagascar.
Une fabrique de bougies faites avec le blanc de baleine s'établissait en Basse-Ville.
L’armement baleinier se serait peut-être définitivement implanté à Dunkerque si la Révolution ne l'en avait empêché.
1791- treize navires participent encore à la campagne baleinière.
1792- les Nantuckois n’arment plus que 3 navires.
1793- les deux seuls navires nantuckois expédiés pour la pêche à la baleine, partirent en arborant le pavillon américain.
L’implantation des Nantuckois s’arrête là.
Voir: Poème de VICTOR DE COURMACEUL LA PECHE A LA BALEINE
d'après un mémoire de P. Demolière 1909
Société dunkerquoise pour l’encouragement des sciences.
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