Les Fusiliers marins à Dunkerque 1944/1945
La ligne de front s’étend d’Ouest en Est sur près de 70 kilomètres, de Mardyck jusqu’à la lisière de Bray-Dune-Plage, en passant par Spycker, Le Grand MilleBrugge et Bergues.
Les F.F.I. de la région de Dunkerque, très présents, combattent en première ligne aux côtés de la brigade Liska.
Précédant le débarquement de Normandie, les bombardements tactiques alliés détruisent les neuf dixièmes de Dunkerque, mais les défenses allemandes y demeurent très solides.
Après avoir libéré Dieppe le 31 août 1944, Boulogne le 22 septembre et Calais le 1er octobre, le XXP Groupe d’Armées de Montgomery, pressé d’atteindre au plus vite les côtes belges et de dégager l’estuaire de l’Escaut, contourne Dunkerque, laissant devant le camp retranché la brigade tchécoslovaque du général Liska.
Le capitaine de corvette Aclocque, qui vient de prendre le commandement de la Marine à Boulogne, estime indispensable qu’une formation de la Marine soit présente à Dunkerque pour participer aux opérations de libération de la ville. Cette unité devra, après la libération de la ville, représenter la Marine française dans le port et constituer le noyau du personnel de l’unité Marine Dunkerque.
Dès lors, le capitaine de corvette Aclocque regroupe deux sous-officiers, vingt-deux quartiers-maîtres et marins volontaires. Le petit groupe, baptisé corps franc de Dunkerque, reçoit du commandement britannique équipements et armes (principalement récupérés à l’ennemi). Le 30 décembre, le groupe de fusiliers marins est officiellement reconnu.
Le corps franc de Dunkerque prend donc position, avec l’accord du commandement allié, le 9 décembre aux côtés des F.F.I. entre Mardyck et la côte. Il se trouve ainsi à 200 mètres des troupes allemandes ! Cette position présente de nombreux dangers car les Allemands forcent souvent les lignes alliées.
C’est ce qui se produit dès le lendemain : alors que les marins n’ont pas encore achevé l’aménagement de leurs positions, une dizaine d’Allemands les attaquent.
Dégagés grâce à l’intervention du 5e régiment de chars britanniques arrivés depuis peu en renfort, les marins français perdent toutefois l’un des leurs.
Le détachement regagne sa position, défend son poste avancé dans des conditions pénibles et par un grand froid. Il s’y tient pendant près de trois semaines devant contenir les fréquentes attaques ennemies. Ces engagements ponctuels exigent des marins F.F.I. une très grande vigilance. Le 28 décembre, les fusiliers marins épuisés sont relevés et envoyés en repos à Boulogne.
Mais dès le 2 janvier 1945, ils doivent regagner le front à Loon Plage.
Les Alliés, très satisfaits par l’action accomplie par les French Marines, demandent au capitaine de corvette Aclocque son accord pour utiliser sa formation dans des opérations de patrouille et de coups de main dans le secteur de Mardyck . Alors divisé en quatre patrouilles de quatre à cinq hommes, le corps franc de Dunkerque effectue ses missions de reconnaissance. Il doit déceler toute activité ennemie, devant éviter mines et embuscades allemandes.
Le 11 janvier, les patrouilles se placent sous le commandement de l’enseigne de vaisseau Denielou. Elles accomplissent un travail remarquable.
Ainsi le 2 février, une des patrouilles du corps franc de Dunkerque se retrouve face à une quinzaine d’Allemands.
Composée d’un caporal britannique, d’un second-maître, d’un quartier maître et d’un matelot, la patrouille est mise à mal et faite prisonnière. Le quartier-maître, blessé, est traîné par les pieds sur 1500 mètres vers les lignes adverses, puis réussit à se dégager, en menaçant l’ennemi d’une grenade, pour finalement rejoindre un poste avancé anglais.
Un mois plus tard, dans la nuit du 2 au 3 avril, les Allemands lancent une offensive qui engage 800 de leurs hommes. Les hostilités se déroulent entre le fort de Mardyck et Loon Plage, au niveau du terrain d’aviation. Deux hommes du groupe Marine, le quartier-maître canonnier Soohy et le matelot Milhamard, réussissent pendant plus de deux heures - bien que gravement blessés aux jambes à arrêter une section allemande.
Du 10 au 11 avril, de nouveaux combats surviennent. Les Allemands profitent de la nuit pour déclencher un assaut sur le moulin de Spycker, situé à moins de 10 kilomètres de Dunkerque sur la rive du canal de Bourbourg.
Ils parviennent à s’emparer de la position tenue par les Alliés et anéantissent toute une compagnie du 33e régiment d’infanterie.
A la demande du colonel britannique commandant ce secteur, le corps franc doit remplacer la compagnie décimée et se trouve de fait projeté dans un affrontement très violent qui dure près de quinze jours.
Grâce à la détermination dont il fait preuve au front, le groupe Marine de Dunkerque est rapidement apprécié des Alliés, notamment les officiers britanniques qui les appellent leurs first class boys. Mais l’effectif du corps franc, 25 hommes à sa création, est très insuffisant et Amiral Nord insiste auprès de l’Etat-Major général pour qu’un bataillon de fusiliers marins de 250 hommes soit constitué.
Ce projet n’aboutit toutefois pas. Mais sur le terrain, les volontaires rassemblés à Boulogne, près de 150 marins, rallient progressivement le corps franc qui prend, dès le mois de mars, le nom de “bataillon de Dunkerque”.
Usant de diplomatie et d’ingéniosité, le capitaine de corvette Aclocque procure armes et équipements à son bataillon grâce à la contribution amicale, mais officieuse, des autorités britanniques.
Le 9 mai 1945, le vice -amiral Frisius signe à Wormhoudt la capitulation de la garnison allemande de Dunkerque. Le capitaine de corvette Aclocque est présent à la cérémonie. Son bataillon de fusiliers marins peut entrer le premier dans Dunkerque le 18 mai. Employé à la récupération et à la garde du matériel portuaire,
le bataillon de Dunkerque est finalement dissous le 1er juillet 1945.
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